Cette humeur n’est pas un droit de réponse. Mais parce qu’en démocratie la parole est libre. Permettez-nous, au nom de cette liberté, d’opiner sur l’histoire d’Emmanuel Tiando, Professeur d’université, alors Secrétaire  général de l’université d’Abomey-Calavi sous Kemoko Bagnan, « Sauvé » dit le récit lu pour vous sur la toile, de la vindicte estudiantine en 2004 par un étudiant, aujourd’hui, politicien.

Au nom de la promotion 1987-1990 de l’Ecole Normale Supérieure (Ens option histoire) de Porto-Novo et  de celle de 1991 et 1993, Licence et maîtrise, option histoire de l’Université Nationale du Bénin (Unb), permettez-nous de rendre hommage à nos maîtres. Ces maîtres firent de nous à l’instar de nos parents, de nos maîtres du primaire, de nos professeurs du secondaire ce que nous sommes aujourd’hui. En ce qui concerne nos professeurs du supérieur, ils furent nombreux. Ceux qui nous marquèrent durant ces année-là à l’Ens et à la Faculté des Lettres Arts et Sciences Humaines et au Département d’Histoire et d’Archéologie eurent pour noms Jérôme Alladayè, Felix Iroko, feu Apithy, Roger N’Tia, Comlan Adagba, les frères Adandé, Joseph et Alexis, Elysée Soumoni, De Medeiros François, Sébastien Sotindjo, Bellarmin Codo, Léon Bio Bigou, pour ne citer que ceux-là et Emmanuel Tiando, acteur de ce récit lu pour vous qui m’impose à mon corps défendant, cette humeur.

Je me rappelle, comme si c’était hier, de Roger N’Tia, l’homme de « l’agora » comme on l’appelait affectueusement. Il nous enseigna l’histoire de la Grèce antique et de ces grands hommes qui furent au commencement de la démocratie. Plus encore d’Emmanuel Tiando qui nous enseigna l’histoire de l’Egypte ancienne et qui, avec une verve à nulle autre pareille, nous ressassait l’histoire de Toutankhamon, Akhenaton et autre Néfertiti, des pyramides et que sais-je encore. Depuis, le maniement de la langue de Molière et le recours à l’histoire dans nos écrits, a fait de nous des virtuoses de la plume sans fausse modestie dans la presse écrite béninoise post renouveau démocratique.

Répondant à l’appel de la République, l’homme conduit depuis plus d’une décennie la Cena, cette boîte de pandore qui vous éclabousse à votre corps défendant si vous osez prendre à cœur votre mission. C’est le cas, heureusement ou malheureusement, de celui d’Emmanuel Tiando.

Que cela suffise pour qu’on lui jette de l’opprobre est une chose que je considère comme une ingratitude, même si les faits relatés sont vrais. Quel plaisir y a-t-il à ressasser un évènement du genre aujourd’hui ? Quel est ce plaisir malsain qu’on cache derrière ce retour à l’histoire tumultueuse des luttes estudiantines qui ont jalonné la vie de nos universités ou parfois, nos professeurs ont été payés en monnaie de singe ? C’est une infamie. Avec le rappel d’un incident du genre, qu’on veuille se faire passer pour un « héros »  qui a « sauvé » son maître de l’hystérie collective de voyous d’une époque révolue, est inapproprié. Quel honneur à s’enorgueillir d’avoir « sauvé » son maître ? Si c’était le cas cette année-là, le « zéro » de ce jour-là ne fut pas un « héros ». Comment se comporter face à ces hommes et à ces femmes qui nous ont donné le savoir ?

A propos d’histoire, on fait recours à l’histoire pour construire le présent. Faire retour à l’histoire pour s’en servir à des fins conflictuelles n’est pas un facteur de cohésion nationale et de paix. Et je me rappelle ce sujet d’histoire qui me vient toujours à l’esprit: «En quoi la connaissance de l’histoire précoloniale de notre pays constitue pour nous un facteur d’unité nationale ?»

Quand, par un concours de circonstance nous nous retrouvons face à nos éducateurs en bonne ou mauvaise posture, le premier réflexe, leur renvoyer l’ascenseur avec respect et reconnaissance s’impose à nous, avec rien en retour. Vouloir s’en enorgueillir après dans un rappel historique en déphasage avec le présent, cache mal une intention de vouloir ternir l’image d’un homme. Parlant d’ingratitude, César, le jour de son assassinat se retourna et dit à Brutus: «Toi aussi mon fils !»

Pour nous, l’élève qui dénigre Son Maître est un ingrat, Et parlant de la référence de la Bible dans ce récit qui est à la base de cette humeur, j’oppose aussi les paroles saintes: « Honore ton père et ta mère, afin que tes jours se prolongent dans le pays que l’Éternel, ton Dieu, te donne. » Exode 20,12

Pour moi, nos éducateurs, nos parents sont nos héros. Qu’ils bénéficient de notre part d’un quelconque geste de reconnaissance, ne doit pas être pour nous un exploit, ni une attitude à citer en référence. C’est ce qui devait être. Pour nous, mieux pour moi, Emmanuel Tiando est un super héros. Au service de l’Université comme de la République, il aura donné le meilleur de lui-même. Qu’on se le dise.

 

Christ –Ange OLADIMEDJI

                                                        (Collaboration)