Ce n’est pas la joie dans le rang des structures béninoises agréées dans le convoyage des pèlerins à la Mecque. Depuis deux ans, leurs acteurs broient le noir. Ils accumulent des pertes que certains parmi eux chiffrent déjà en plusieurs millions de Fcfa déjà.

El-Hadj Affissou Anonrin

Pour la 2è année consécutive, le pèlerinage à la Mecque est interdit à tout musulman non résident en Arabie Saoudite. Ainsi en ont décidé les autorités saoudiennes. La principale raison évoquée pour expliquer cette décision est la pandémie du Covid-19 qui sévit encore dans le monde malgré tous les efforts que ne cessent de consentir les Etats. Au nombre des pays que cette décision prise par l’Arabie Saoudite touche,  se trouve bien entendu le Bénin. Dans un communiqué rendu public le 14 juin 2021, le Ministre béninois des affaires étrangères qui assure la Présidence du Comité de supervision et d’orientation du Hajj a en effet informé les musulmans béninois candidats au Hajj 2021 que les autorités saoudiennes ont décidé de limiter le Hajj 2021 à 60.000 personnes y compris les résidents étrangers en Arabie Saoudite. Ceci, dans le souci de préserver la santé et la sécurité des pèlerins à cause de la pandémie du Covid-19. En français facile, cette mesure prise par les autorités saoudiennes interdit tout simplement à tout pèlerin étranger qui n’est pas encore sur le sol saoudien d’effectuer le Hajj 2021 comme cela a été d’ailleurs le cas l’année dernière.Pour les convoyeurs béninois, cette mesure prise par les autorités saoudiennes tombe comme un véritable coup de massue et plombe les espoirs. C’est du moins ce qu’a expliqué El-Hadj Bachirou Gbadamassi, premier vice-président du Conseil national de coordination du Hajj au Bénin (Conaco Hajj-Bénin) dans un entretien qu’il a accordé à nos confrères de Radio Frisson. Sans avancer un chiffre exact, il parle de perte en plusieurs millions de Fcfa. Et ceci depuis le rendez-vous manqué de 2020, année d’apparition de la Covid-19. «Déjà au cours de l’année dernière où il n’y a pas eu le Hajj, nous avons vécu des moments très difficiles marqués par des pertes énormes. Pour cette deuxième année consécutive où on a beaucoup investi avec des réformes assez précises et contraignantes instaurées par l’Etat pour les convoyeurs, je ne peux que vous avouer que la décision de ne pas ouvrir le Hajj 2021 aux Béninois est pour nous un cauchemar », a dit M. Gbadamassi. «Lorsque vous avez l’autorisation pour organiser le convoyage, vous n’avez que deux, trois ou au plus quatre jours pour déposer la liste de vos pèlerins et commencer par faire les versements ou les avances. Mais si avant la date échue,  vous n’arrivez pas à combler votre financement, c’est-à-dire les frais d’assistance des pèlerins, alors vous risquez de perdre beaucoup de choses. C’est 200.000 Fcfa par pèlerin que vous devez avancer au cas où vous n’aurez pas versé l’intégralité des frais d’assistance », explique El-Hadj Gbadamassi. « Dès lors que nous avions eu l’acceptation de la notification de nos dossiers pour les agréments qu’on doit avoir dans les quelques jours, chacun a commencé par courir. Pour pouvoir être en règle avec les nouvelles réformes, nous avions dû faire des dépenses. Nous avons fait face à des charges pour pouvoir constituer les Groupements d’intérêts économiques (Gie) exigés par le gouvernement pour une meilleure organisation du Hajj. Lorsque nous avons eu les notifications, c’est alors que nous avons commencé la chasse aux pèlerins. C’est la pratique puisque les pèlerins que nous convoyons ne sont pas à Porto-Novo, Cotonou et autres. Ils sont dans des villages, dans les coins les plus reculés du pays, dans le Nord, dans les camps peulhs. Pour aller à leur rencontre pour les sensibiliser et leur demander de s’apprêter pour les vaccinations et commencer par prendre les avances parce que les délais sont très courts, c’est des fonds que nous avons engagés. Juste après avoir fait tout ceci, l’Etat annonce que certains convoyeurs ont commencé par prendre l’argent chez des candidats au Hajj. Pour éviter la survenue de déconvenues graves,  l’Etat a demandé qu’on restitue aux gens l’argent qu’on leur a pris comme avance. Or vous savez que les convoyeurs ont toujours des charges. Lorsqu’on vous demande de restituer les fonds, vous êtes tenus  d’obtempérer. Et c’est ce que nous avons fait. Les avances prises ont été restituées à 100% dans la plupart des cas. Malheureusement ceci a été fait alors que nous avions déjà engagé des dépenses », a-t-il ajouté.

Les regards tournés vers le pouvoir

« La question qu’on doit se poser maintenant est la suivante : quelle sera la contribution de notre Etat pour pouvoir un temps soit peu soulager les convoyeurs pour tout ce qu’ils ont déjà engagé comme dépenses ? », s’est interrogé El-Hadj Bachirou Gbadamassi. «Toutes ces pertes sont énormes pour nous. Mais comme nous savons que nous avons un gouvernement sérieux qui avait déjà par le passé aidé des gens qui se sont retrouvés dans des situations analogues à celle qui est aujourd’hui la nôtre à cause de la Covid-19, nous espérons et nous pensons qu’il est souhaitable que l’Etat puisse nous faire un clin d’œil en nous aidant à compenser un peu tout ce que nous avons engagé comme frais pour préparer le Hajj 2021 surtout qu’il nous a été demandé de retourner totalement ce que nous avons pris comme avance chez les candidats au Hajj », a-t-il poursuivi avant d’implorer l’indulgence du Président Talon qui a placé son second mandat sous le signe du social à écouter le cri de cœur des convoyeurs.